Sortie de crise ?

Décidément, Nicolas Sarkozy ne sait que manier le mépris. A Séoul, il n’a fait que passer, sans doute pour étrenner son nouvel avion et se présenter comme le président de ce G20… totalement inutile ! Le devoir d’indignation s’est perdu dans les sables de l’impunité des conseillers du Président comme de celle des délinquants économiques.

La crise systémique du capitalisme est à la fois financière, économique, sociale, politique, culturelle, écologique… En bref, une crise de civilisation.
Le capitalisme, s’il veut continuer d’exister, doit infliger une défaite à l’ensemble du mouvement ouvrier, qu’il soit syndical, politique ou social. Sarkozy le sait. Le recul de l’âge de la retraite de 60 à 62 ans n’avait aucune nécessité économique. Laisser faire les lois de 1993, 2003, 2008, suffisait à baisser le montant des pensions de retraite. Sa contre-réforme était bien une déclaration de guerre…

Les raisons des politiques d’austérité.

Pourquoi cette contre-réforme ? Plus généralement pourquoi la poursuite, l’accentuation, des politiques d’austérité drastiques ? Le but est double.
D’une part, augmenter le profit des entreprises en baissant la masse salariale totale. Le chômage de masse permet de faire accepter aux salariés une dégradation continue de leurs conditions de salaire, d’emploi et de travail pour faire chuter le coût du travail. Ainsi, les grandes entreprises, celles du CAC 40, ont enregistré une hausse de leur profit, se traduisant par la hausse, provisoire, des cours de la Bourse. Les bénéfices proviennent aussi de la spéculation sur les dettes souveraines des Etats, grâce à l’intervention des Banques centrales et des Etats-Nations qui leur ont permis d’éviter la faillite et de poursuivre leur activité sans changements significatifs. Changer les règles du jeu est un impératif catégorique pour éviter la répétition des crises et de nouvelles secousses.
D’autre part, continuer dans la voie de la privatisation en diminuant les dépenses publiques. Les services publics sont asphyxiés, incapables de faire face à leurs besoins pour répondre aux demandes sociales des citoyens. Les droits et les solidarités collectives s’évanouissent pour laisser la place à une société individualisée, éclatée, précarisée. La contre-réforme des retraites se traduira par un immense développement des fonds de pension, des retraites par capitalisation pour générer des bénéfices juteux de ces sociétés et individualiser plus encore les salariés. Au-delà, la privatisation a deux avantages. Elle permet de définir de nouveaux lieux d’accumulation du capital et d’éviter tout contrôle démocratique. La privatisation de la guerre aux Etats-Unis par George W. Bush lui a ainsi permis de s’affranchir du contrôle par le Congrès. Ce mouvement de privatisation participe de la remise en cause des libertés démocratiques.
Cette politique économique d’austérité fait peur. A tous les économistes et, paradoxe des paradoxes, aux marchés financiers eux-mêmes qui voient se profiler la prochaine récession. Baisser toujours plus les salaires et les retraites, dans un pays où 90 % de la population active est salariée et qui connaîtra une augmentation des plus de 60 ans, produit mécaniquement la chute du marché final – la réduction des capacités de consommation – et la surproduction, donc la récession. Cette tendance se trouve renforcée par la crainte des banques de la faillite des entreprises et des autres banques comme du surendettement. Les encours de crédit ont tendance à diminuer, alors que tous les agents économiques sont endettés. Tout le monde voit bien que les gouvernants des pays de l’Union Européenne entraînent les populations dans le mur en organisant la prochaine dépression. Une sorte d’effet d’inertie empêche la réflexion sur d’autres politiques. Seuls les Etats-Unis et les pays dits « émergents » font exception à la règle.

Quelle coordination ?

Les politiques d’austérité sont des forces centrifuges. Elles n’appellent aucune coordination. Au contraire, elles renforcent la concurrence des systèmes sociaux et font reculer toutes les solidarités. Dans le même mouvement, elles répondent aux diktats des marchés financiers via les agences de notation.
Chaque Etat-Nation a voulu gérer la crise pour défendre ses capitalistes, qu’ils soient banquiers ou industriels, contre les autres. Ces égoïsmes nationaux ont renforcé une crise latente de la construction européenne et ouvert la porte à la spéculation contre les dettes souveraines, obligeant les gouvernements à baisser toujours plus les dépenses publiques pour diminuer le déficit public par rapport au PIB, en refusant de s’interroger sur une réforme fiscale nécessaire. Les impôts ont augmenté via les impôts indirects – hausse du taux de la TVA dans plusieurs pays dont la Grèce – les plus inégalitaires.
Cet éclatement sert la spéculation. Après la Grèce, c’est l’Irlande qui en fait les frais. Elle connaît une très forte augmentation de son taux d’intérêt sur 10 ans du fait de la dégradation de la notation de sa dette. La BCE est intervenue pour racheter une partie de ses obligations(1). Autrement dit, elle finance la dette ancienne au lieu de permettre la baisse des taux d’intérêt en intervenant sur l’endettement actuel.
« La guerre des monnaies » provient directement de cette gestion « nationale » de la crise. Baisser le cours de la monnaie permet de gagner des parts de marché au détriment des autres capitalistes. Une sorte de dopage de la compétitivité qui diffuse la surproduction. La solution passe par la remise en cause de la logique imposée par les marchés financiers.

Comment en sortir ?

Dans ce contexte, le G20 ne pouvait rien décider. Il a constaté les « déséquilibres », la « guerre des monnaies »… en attendant une prochaine réunion sous présidence française. La proposition française d’un nouveau système monétaire international est restée dans les cartons ou dans la soute de l’avion.
Contrairement aux déclarations sarkoziennes, la crise est devant nous. Les faillites restent à l’ordre du jour. Pour la combattre, il faudrait une rupture. L’idéologie libérale en crise n’a pas laissé place, pour le moment, à une autre vision du monde. Elle s’impose y compris dans une partie du mouvement syndical et politique de gauche. Pour combattre cette crise systémique, les solutions se présentent d’elles-mêmes. D’abord, augmenter les salaires et les retraites pour alimenter le marché final et, ainsi, promouvoir la croissance. Cette augmentation du PIB allégerait mécaniquement le poids des déficits (budget, Sécurité sociale). Les créations d’emplois qui en découleraient permettraient à la fois de baisser les allocations chômage et d’augmenter les recettes de l’Etat et de la Sécurité sociale. Ensuite, développer les services publics, en créer de nouveaux pour lutter à la fois contre la crise économique provoquée par l’impératif de la valorisation du capital et élargir les solidarités collectives. La crise systémique du capitalisme oblige à une réflexion sur une croissance solidaire et plus éthique. Ethique et économique ne sont en rien contradictoires. Au contraire. Le mouvement syndical devrait saisir cette opportunité. Sinon, de l’autre côté, se prépare un monde barbare… 1) La Fed a quant à elle décidée de racheter les Bons du Trésor de l’Etat, donc de financer directement le déficit de l’Etat par la création monétaire. Elle injectera 600 milliards de dollar. Une sorte de politique de relance keynésienne par ce biais. Bernanke, son président, entend ainsi lutter contre la déflation. La BCE reste, elle, au milieu du gué. Premier résultat de cette injection de monnaie : la baisse du dollar et la hausse de l’euro et du yen. Les marchés viennent de s’apercevoir que la situation des pays d’Europe était proche de la catastrophe – on ne pourra pas dire qu’elle n’était pas annoncée – et ont commencé à faire remonter le dollar. Travaux pratiques : le budget du gouvernement français Le Parlement vote à la fois le budget de l’Etat et celui de la Sécurité Sociale. Il est prévu une baisse drastique des dépenses sociales, conséquence de la loi sur les retraites, et des dépenses publiques selon la volonté du gouvernement de casser l’ensemble des services publics tout en donnant des gages réclamés par les marchés financiers via les agences de notation (les fameux 3 A). La lutte contre les déficits publics est devenue la seule justification idéologique de ces politiques d’austérité. Les taxes augmenteront, renforçant les inégalités. Le chiffon rouge des « niches fiscales » – un mot pour cacher une politique fiscale en faveur des riches – se traduira par la baisse des revenus moyens, déprimant le marché final. La politique budgétaire – l’action sur les dépenses – sera très restrictive. La baisse du nombre des fonctionnaires –un retraité sur deux non remplacé –, des crédits de fonctionnement et d’investissement ne permettra pas aux services publics, à commencer par l’éducation et la santé, de remplir leurs missions. Le chômage, surtout celui des jeunes, va encore augmenter, faute de créations de postes et d’emplois des « seniors » obligés de travailler plus longtemps. La croissance, d’un peu plus de 1 % pour cette année si l’on en croit les prévisions de l’INSEE, est trop faible pour résister à ce traitement de choc, même si la consommation, pour le moment, a légèrement augmenté.

Documents joints