Contribution de l’EE à l’entrée du CDFN

Macron agit avec méthode, il s’en prend de façon systématique à la très grande majorité de la population, salarié-es, précaires, chômeur-es, retraité-es ; il attaque tous les cadres collectifs, partis politiques, syndicats, associations ; il entend détruire tous les acquis sociaux les uns après les autres… Son gouvernement applique les mesures libérales les plus brutales : il frappe fort, il frappe vite, il frappe sans relâche. C’est un pilonnage permanent, théorisé et planifié qui s’appuie sur la faiblesse actuelle de ses opposant-es, syndicaux y compris. Pour autant le syndicalisme, avec d’autres, porte l’immense responsabilité de constituer un cadre de résistance à tous ces mauvais coups et de porter des alternatives de justice sociale. Mais de toute évidence, la méthode employée pour nuire est différente, l’agresseur n’est plus le même non plus, et nous avons changé de paradigme : il faut donc désormais – et d’urgence – changer de stratégie syndicale.


S’il est toujours possible de disserter sur l’affaiblissement des syndicats ou leur difficulté à mobiliser, c’est le mouvement social qui occupe le terrain depuis la rentrée, à l’initiative des syndicats, qui a mis à jour la nature réelle de la politique de ce gouvernement. Très bas dans les sondages d’opinion, les guerres que Macron mène contre les salarié-es (notamment à travers les ordonnances), contre la jeunesse (baisse des APL cet été, sélection à l’université aujourd’hui), contre les précaires et les associations (suppression des contrats aidés) font de lui le président des ultra riches, ce que ne dément pas le silence assourdissant du gouvernement sur le scandale des Paradise papers. Cette politique de guerre de classes s’en prend à tout ce qui fonde notre modèle social : les attaques contre les services publics et la FP donneront lieu à rupture d’égalité sur le territoire et entre les usagers.

Une société solidaire ?

La lutte contre le terrorisme est le prétexte à mener une chasse honteuse contre les migrant-es, à nourrir une idéologie de stigmatisation des musulman-es, et donc à contribuer à un climat de racisme ordinaire et de haine de l’autre sur le territoire. La criminalisation des aidant-es, l’acharnement contre les militant-es de la Roya en particulier sont inacceptables, il faut en finir avec le délit de solidarité. La lutte contre le terrorisme est aussi le prétexte pour s’en prendre aux libertés, et là encore, les reculs sont nombreux : la France a quitté l’état de droit depuis fin octobre en adoptant la loi anti-terroriste, qui comporte des mesures disproportionnées aux seules mains de la police, qui restreint les libertés publiques et porte atteinte aux libertés individuelles. Le pays a quitté l’état d’urgence pour inscrire dans le droit commun des dispositions pérennes sécuritaires et liberticides, c’est une atteinte très grave à la démocratie, c’est une régression inacceptable.

Sur le terrain des luttes

Les salarié-es ne sont pas résigné-es, les luttes existent dans les entreprises, dans les établissements scolaires, au plus près des salarié-es dès qu’ils-elles sont touché-es de plein fouet. Les retraité-es sont nombreux et nombreuses à se mobiliser, comme ce fut le cas le 28 septembre, pour protester contre la hausse de la CSG et la paupérisation accrue par les mesures gouvernementales. L’indignation existe aussi contre le sort fait aux migrant-es, contre l’injustice sociale, contre la privation des libertés.

Depuis la rentrée, la mobilisation menée contre les ordonnances a jalonné le terrain de journées d’action qui sont autant d’actes de contestation ; elles ont contribué à porter une opposition voire une colère pas toujours audible, elles ont permis d’attirer l’attention de la population sur les méfaits gouvernementaux et en cela, elles ont été utiles. Il est nécessaire pour le syndicalisme de transformation sociale de maintenir ce cap, d’occuper le terrain politique de la protestation face à Macron.


Mais où en est ce « syndicalisme de transformation sociale » ?


Constitue-t-il un cadre, permet-il un espace de réflexion et d’élaboration stratégique commune des syndicats qui s’en réclament et répondant aux enjeux fondamentaux de la période ? Rien n’est moins sûr alors que les échanges sont peu nombreux entre CGT, Solidaires et FSU, et il faut le déplorer. La FSU, qui porte le renforcement de ce cadre dans ses mandats, est-elle actrice de la transformation sociale, en fait-elle une priorité ?

La FSU a hésité pour les appels des 12, 21 septembre et 19 octobre… A juste raison, elle quitte la réunion interpro du 24 octobre aux côtés de CGT, FO, Solidaires et des organisations de jeunesse, mais elle n’apparaît pas dans les premiers appelants au 16, elle ne participe pas à l’élaboration de la plate-forme… Elle « s’associe » à l’appel du 16, un peu plus tard, parce qu’elle cherche à préserver l’unité de l’intersyndicale FP. Si préserver l’unité FP est juste, il n’empêche que la fédération se trouve écartelée : elle ne signe pas non plus l’appel FP à se mobiliser le 16 avec ses partenaires CGT-FO-Solidaires, appel qui sort pourtant après le rassemblement intersyndical du 6 novembre, et ne met donc pas en péril l’unité de cette action.
L’« entre-deux » dans lequel se trouve la fédération peut déboucher sur une impasse : entre deux orientations, celle qu’elle partage avec les opposant-es à la loi travail, et celle des syndicats dits « réformistes » de l’intersyndicale FP, orientation à laquelle elle n’adhère pas… La FSU évolue dans un « no man’s land » qui pourrait la conduire à une forme d’isolement, et il ne faut pas s’étonner alors que les partenaires « de transformation sociale » négligent de l’associer à l’élaboration des actions en cours… Cet « effacement » risque d’affaiblir l’identité de la fédération dans le cadre de la préparation des élections professionnelles et ne pas pousser les électeurs et électrices à s’engager pour elle.

Changer de stratégie

Pourtant, et sans minimiser aucunement les difficultés actuelles, il serait plus qu’urgent de définir un plan d’action, d’élaborer une stratégie commune en intersyndicale dans laquelle la FSU doit retrouver toute sa place. Depuis la rentrée, la division syndicale n’a pas été un atout pour la réussite du mouvement social, il est indispensable d’inverser la donne : face à Macron qui abat ses cartes, nous perdons un temps précieux.

Les journées de mobilisation se sont succédé depuis le 12 septembre, sans que des perspectives à moyen terme ne soient avancées pour rassembler les salarié-es. Le syndicalisme de transformation sociale doit poursuivre l’objectif indispensable de convergence de toutes les forces d’opposition à Macron et au libéralisme, en participant à la mise en place de modalités qui rompent avec les journées perlées telles qu’elles se succèdent depuis le début de l’année : pour la FSU, c’est à la construction de cet objectif qu’il faut s’atteler. Il faut tout faire pour rendre cette convergence possible, seul moyen de construire un rapport de forces suffisant contre ce gouvernement : faire converger toutes les oppositions, qu’elles soient syndicales, associatives, politiques, intellectuelles… et chercher à rassembler, à construire un front commun de résistance et de combat. Personne ne gagnera seul-e : cette démarche unitaire, qui doit se construire dans le respect de l’identité de chaque composante et également de l’indépendance syndicale, doit être portée à la réflexion de notre fédération.

Procéder par étapes, mener toutes les luttes

Pour atteindre cette nécessaire convergence, il ne faut négliger aucun combat : dans l’éducation, la fédération doit mener campagne pour dénoncer et lutter contre les attaques. Sur la question de la sélection à l’université, la démarche fédérale s’impose pour faire les liens entre le supérieur et le secondaire, montrer la cohérence avec la transformation du bac, pointer le sort réservé aux bachelier-es professionnel-les notamment, mettre en lumière les conséquences de la réforme proposée sur l’ensemble des parcours scolaires. Instaurer la sélection à l’entrée dans le supérieur constituerait une régression historique : la FSU doit tout mettre en œuvre pour l’empêcher, engager un travail intersyndical sur la question et contribuer à la mobilisation au plus près des organisations de jeunesse.

La mobilisation contre les mesures du gouvernement dans la Fonction Publique doit se poursuivre : la réussite de la grève du 10 octobre, et l’absence de réponse positive à nos revendications ne peuvent qu’appeler des suites. Une nouvelle journée d’action unitaire (nouvelle grève des agent-es et/ou qui pourrait prendre la forme d’une grande manifestation à Paris de toute la FP) est nécessaire dans des délais rapprochés. Les dossiers en cours, (apprentissage, formation professionnelle, assurance chômage) comme ceux à venir (retraites, sécurité sociale), c’est en ordre de bataille qu’il faut les aborder : préparer la mobilisation des salarié-es passe par un travail de campagne sur ces sujets dès maintenant, en amont, et de façon intersyndicale avec les OS qui partagent notre position afin de porter et d’imposer des alternatives.

Catalogne


Utiliser la force brutale pour empêcher un vote, destituer un gouvernement légitime issu des urnes, en emprisonner les membres ne règle rien, cela éloigne d’une solution et c’est agir à l’opposé de l’État de Droit que le gouvernement espagnol prétend défendre. Le refus du gouvernement espagnol, depuis des années, d’ouvrir des négociations sérieuses et respectueuses sur la nature des relations entre la Catalogne et l’État espagnol est à la source de la crise actuelle.
Et cette crise risque de durer au delà des élections du 21 décembre .
D’ores et déjà, sans se prononcer sur le fond du dossier, il faut dénoncer les mesures répressives graves qui se mettent en place au cœur de l’Europe, dénoncer la répression en Catalogne, demander la libération des emprisonné-es politiques dont des responsables d’Associations indépendantistes : Jordi Sanchez (Omnium Cultural) et Jordi Cuixart (ANC) et des membres du gouvernement catalan. Demander au gouvernement français et aux institutions européennes qu’ils interviennent pour obtenir la libération des dirigeant-es de la Généralité de Catalogne emprisonné- es, et agissent pour une solution politique négociée, respectant le droits des Catalan- es à décider de leur avenir dans un cadre démocratique.



Egalité femme/homme

Les témoignages en cascade de femmes ayant subi agressions ou harcèlement sexuels se multiplient : la honte est en train de changer de camp, enfin ! L’ampleur du phénomène met en évidence son caractère systémique. Apparaît de plus en plus clairement la nécessité de lutter contre la domination masculine et contre la « culture du viol » qui imprègnent nos sociétés, de déconstruire les stéréotypes de genre, afin d’œuvrer à une société plus égalitaire et émancipatrice. L’éducation à l’égalité et à la sexualité est une réponse incontournable et urgente à mettre en œuvre, et le syndicalisme a son rôle à jouer dans l’accélération du processus.
La langue peut aussi être vecteur d’inégalités, particulièrement quand elle affirme que le masculin l’emporte sur le féminin, ou qu’elle invisibilise la moitié de l’humanité. Si le débat est légitime sur les formes à utiliser pour la mettre en œuvre, la démarche de l’écriture inclusive visant à des usages plus égalitaires ne devrait plus être questionnée.

Action publique 2022

On ne change pas une méthode qui gagne : le gouvernement a fatigué les partenaires sociaux durant tout l’été avec les discussions autour des ordonnances, puis à la rentrée avec les GT sur la réforme de l’accès à l’université… C’était prévisible, le gouvernement a fini par passer en force. Sur le dossier FP, les 9 sont unis pour dénoncer les mesures régressives (carence, salaires, emploi) et appeler à la grève le 10 octobre, et même pour boycotter le CCFP le 6 novembre. A présent, le gouvernement ouvre forums et consultations sur l’avenir des SP et de la FP : ses intentions sont clairement énoncées, il s’agit d’externaliser des pans entiers du SP, de supprimer des missions de SP et des postes, de revoir les conditions de recrutement, d’affaiblir en tous points le SP. CGT-Solidaires et FO ont décidé de boycotter cette mascarade de dialogue social. L’EE n’a jamais prôné la politique de la « chaise vide », mais il faut réfléchir aux conséquences d’une présence éventuelle. De fait, il n’y a donc plus d’unité syndicale sur cette question : comment s’expliquer que la FSU se retrouve auprès des organisations « réformistes » et en rupture avec ses partenaires de transformation sociale ?