Cécile Ropiteaux :Féminisme et syndicalisme

Pendant plusieurs mois, le secteur Femmes a échangé avec une graphiste, qui a travaillé bénévolement, afin de créer un logo. Ce logo a été finalisé début février, ce qui était trop tardif pour commander des auto-collants, comme nous l’a indiqué le trésorier de la FSU.
A l’occasion du 8 mars, nous découvrons, sur les documents annonçant la table ronde FSU, que le logo a été modifié.
Le poing, avec un G, a été remplacé par un point, avec un T. Il nous paraît donc important de revenir sur le sens des symboles, et d’expliciter notre démarche.

Le poing levé est le symbole de mouvements ouvriers, marxistes, communistes et antifascistes du début du XXe siècle, signe tout à la fois de lutte, de colère et de solidarité. Il est apparu dans les années 1920 en Allemagne, dans le contexte de la République de Weimar et des violents affrontements entre communistes et fascistes. Le poing fermé a été choisi comme pendant au salut fasciste, comme signe de ralliement de la gauche qui s’oppose aux troupes du bras tendu. On le voit dans les défilés du Front Populaire, et des Républicains espagnols. Il sera ensuite associé à la lutte pour les droits civiques des noirs, aux USA comme en Afrique du Sud contre l’apartheid, repris par les Black Panthers, mais aussi par Mandela qui en fera un symbole plus consensuel. Il sera d’ailleurs utilisé par des mouvements pacifistes, par les révolutions arabes, par occupy wall street, associé à la lutte des classes et à la solidarité.
Nous espérons que la FSU continue à se reconnaître dans cet héritage-là.

C’est dans les années 70 que le poing a été associé au symbole féminin, au départ dans une action pour protester contre le concours de beauté Miss America en 1967, c’est un symbole qui a donc 50 ans. Il a été utilisé également par le black feminism. En France, on en trouve l’image par exemple dans une photo publiée en 1971 par la revue féministe Le Torchon brûle, illustrant une manifestation pour l’avortement.
L’alliance des deux symboles participe de la même démarche que celle de Clara Zetkin qui s’était adressée à l’Association Internationale des Travailleurs en 1910 pour proposer une journée mondiale pour les droits des femmes. Elle montrait ainsi le choix de s’allier au mouvement ouvrier car elle redoutait un risque de récupération, et voulait afficher la volonté de se démarquer du féminisme bourgeois.

Si on enlève le poing, il reste… le symbole de Vénus, associé à la féminité et à la fertilité, et qu’on oppose souvent à Mars, pour nous expliquer par exemple que le cerveau des femmes ne serait pas fait pour les maths ou pour lire une carte routière… Ce n’est pas ce que nous voulons mettre en avant.

Le symbole féministe avec le poing levé est aujourd’hui brandi partout dans le monde. « Il a été vu sur des graffitis dans tous les États-Unis et en Europe, au Japon, en Chine, dans des camps de réfugiés en Palestine et des villages de République Démocratique du Congo, dans des rues à Delhi, sur les restes du mur de Berlin, sur des barrières de favelas de Rio, et même en Corée du Nord et en Arabie saoudite, où il est interdit ».
Avec ce logo, nous voulons nous inscrire dans le mouvement féministe, et dans le syndicalisme de lutte et de transformation sociale.
Lors des réunions de l’Observatoire intersyndical des villes gérées par l’extrême droite, de nombreux militant-es expriment la nécessité pour le mouvement syndical de remettre en avant ses fondamentaux : lutte des classes, coût du capital, droit des femmes à disposer de leur corps, et disent « n’ayons pas peur des mots ».
Oui, contre les systèmes de domination, les luttes sont perpétuelles. Pour les droits des femmes et l’égalité, c’est au quotidien que nous devons lutter contre les préjugés, contre le sexisme, jusque dans ses formes paternalistes et « bienveillantes », contre la minoration, l’invisibilisation des femmes.
C’est tout cela que nous voulons exprimer avec notre logo, nous demandons que le débat soit rouvert.

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