Sandrine Monier : les conventions rurales mises à nu

Le Claux, Vire sur Lot, Condat, St Pierre du Mont, Pouylebon… ont tous un point commun : ces villages perdront leur école à la prochaine rentrée scolaire. Ils sont tous aussi dans un département engagé dans une convention ruralité pluri-annuelle. Protocole pour un schéma territorial d’évolution de l’organisation scolaire pour les uns, convention pour un aménagement du territoire scolaire pour les autres, parfois schéma d’évolution de la structure territoriale, les noms de ces projets renseignent clairement sur les objectifs qui ont prévalu à leur mise en place. Ne nous y trompons pas, ce n’est pas l’école rurale qui est favorisée dans ces projets, mais sa restructuration et sa réorganisation. Tout comme l’ont été avant elle d’autres services publics en milieu rural, heurtés de plein fouet par les politiques de réduction de la dépense publique.

Les conventions rurales visent une redéfinition du maillage scolaire avec, en ligne de mire, une baisse du nombre de petites écoles dont le coût, l’entretien et l’encadrement seraient devenus insupportables. Lot, Dordogne, Nièvre, Hautes-Pyrénées… les cartes scolaires sont sans appel : des fermetures d’écoles de moins de 2 classes ou isolées, des créations/réorganisations de RPI avec des transferts de classes d’une école à une autre, des fusions d’écoles, des concentrations de regroupements d’écoles… Cette logique calquée sur le modèle urbain méprise les réalités locales, favorise le glissement des compétences vers les intercommunalités et peu importe si le temps de transport des élèves est allongé et si la facture est alourdie pour la collectivité.

Le recours à la convention remplit un double objectif : elle engage les élus dans une démarche commune tout en dégageant l’Education nationale de la responsabilité de ses choix. Il faut déconstruire le discours qui dit qu’un effort est engagé en faveur de l’école rurale. Si tel était le cas, il s’agirait de rendre à ces territoires tous les moyens qui leur ont été supprimés et qui concourraient au bon fonctionnement des écoles (RASED complets, moyens de remplacement, équipes mobiles, coordonnateurs de réseaux…). Au contraire, la plupart des conventions entérine aujourd’hui des suppressions de moyens ou le maintien du P/E dans un contexte de baisse démographique…

La fermeture des petites écoles participe au sentiment d’abandon qu’expriment de nombreux citoyens éloignés des pôles urbains. L’égalité d’accès aux services publics est la garantie de la cohésion territoriale et celle-ci est mise à mal par la fragilisation du service public d’éducation de proximité.

Ce n’est d’ailleurs pas un hasard si les conventions cristallisent le mécontentement, comme en témoignent les mobilisations et les créations de collectifs en faveur de la défense de l’école rurale qui regroupent, ici et là, parents d’élèves, citoyens, élus et enseignants. Ces luttes ne sont pas vaines : elles ont permis parfois des bougés sur la carte scolaire, mais aussi des reculs sur la signature des conventions en raison de la résistance des élus.

Le SNUipp-FSU doit s’inscrire dans ces mobilisations en nouant des contacts avec les associations de maires ruraux et les fédérations de parents d’élèves et en informant largement sur son propre projet pour l’école rurale. Celui-ci doit promouvoir le même droit à l’éducation pour tous les élèves, quel que soit le territoire. Cela passe par des moyens spécifiques qui tiennent compte de la réalité des territoires, en vue de conforter les droit des élèves, d’assurer leur réussite, de rompre l’isolement des écoles et d’améliorer les conditions de travail des enseignants.

L’entrée sur l’école par les territoires va être déterminante dans les années à venir, elle sera aussi l’un des enjeux du congrès de Rodez.