Mariage pour tou-tes versus homophobie

Vendredi 17 mai, journée mondiale contre l’homophobie, le Conseil constitutionnel s’est prononcé sur la loi ouvrant le mariage aux couples de personnes de même sexe et François Hollande l’a promulguée. Malgré ses insuffisances, cette loi constitue un réel progrès social, un pas de plus vers l’égalité.

Pour l’essentiel, cette loi pose que la différence de sexe n’est pas, ou plus, une condition pour se marier et actualise les articles du Code civil sur le plan grammatical.

Concernant l’adoption, rappelons que les homosexuel-les avaient déjà le droit d’adopter, en tant que célibataires. Conséquence du droit au mariage, la loi leur ouvrira la possibilité d’adopter en couple (adoption plénière), ou d’adopter l’enfant de leur conjoint-e en adoption simple, ce qui permettra d’officialiser une situation existante et d’offrir aux enfants une meilleure protection juridique, surtout en cas d’absence de l’autre parent biologique. L’adoption simple peut concerner également les hétérosexuel-les (familles recomposées), mais uniquement si le couple est marié. Les autres attendent toujours le statut du co-parent…

Que ne dit pas la loi ?

La PMA (insémination) pour les couples de lesbiennes ne figure pas dans la loi malgré les promesses du gouvernement. Elle nécessiterait en outre une révision de la loi bioéthique qui dit qu’elle est réservée aux couples dont l’infertilité pathologique est médicalement diagnostiquée. La PMA est renvoyée à la loi familles, dont on ne sait plus si elle verra le jour… Les lesbiennes devront continuer à aller à l’étranger, enfin pour celles qui en ont les moyens.
Autres laissé-es pour compte, les personnes trans, qui attendaient une simplification du changement d’état civil, mais sont toujours soumises pour l’instant à l’obligation de subir une chirurgie de ré-assignation sexuelle et une stérilisation forcée pour y prétendre.

On le voit, les arguments des « anti-mariage » ne tiennent pas. Ils agitent aussi le chiffon rouge de la GPA (mères porteuses) alors que Hollande s’est toujours prononcé contre, elle n’a jamais été à l’ordre du jour. Et pourtant, leur mobilisation n’a pas cessé de gonfler, autour de motivations multiples, depuis le refus d’abandonner le modèle traditionnel de la famille, basé sur une complémentarité hiérarchique des sexes, jusqu’à l’homophobie pure et dure, qui s’est déchaînée : les associations signalent une recrudescence alarmante des injures et agressions homophobes.

On a affaire d’un côté à des groupuscules religieux qui cherchent des alliances pour mener à bien leur projet d’ingérence du religieux sur le politique. De l’autre, à des partis de droite et d’extrême-droite qui se recomposent et consolident leurs passerelles, avec un FN qui joue la carte de la respectabilité en prenant ses distances avec les plus radicaux (identitaires et catholiques intégristes).

La lutte contre l’homophobie, toujours

Cette mobilisation était aussi pour l’UMP l’opportunité de se refaire une santé en retrouvant un semblant d’unité après la guerre des chefs. L’UMP n’a d’ailleurs pas caché sa volonté de faire du 26 mai une manifestation d’opposition globale au gouvernement… tout en étant gênée aux entournures, elle qui est légaliste par tradition. Des voix discordantes commencent à se faire entendre. Mais ce parti porte la lourde responsabilité d’avoir instrumentalisé et donc cautionné l’homophobie.

Dans ce climat délétère, la FSU n’est pas épargnée. Suite au colloque « éduquer contre l’homophobie dès l’école primaire » que nous avons organisé le 16 mai, colloque qui est le fruit d’un travail de trois années, le SNUipp-FSU a reçu des coups de téléphone d’insultes ou de menaces et certaines sections départementales, des courriels agressifs.

Cette année, des syndiqué-es ont eu des réactions hostiles à nos appels à participer aux Marches des fiertés. Des militant-es en viennent à questionner nos mandats de transformation sociale et notre implication dans la lutte contre les discriminations.

On le voit, le chemin est encore long… sans relâche il nous faut réaffirmer nos engagements, faire œuvre de pédagogie, rétablir la vérité à propos des études sur le genre, convaincre même en interne… La lutte contre les LGBTphobies, que ce soit à l’école, au travail ou dans la société tout entière doit devenir aussi légitime, aussi évidente, que la lutte contre le racisme, l’antisémitisme ou le sexisme. Elle ne doit plus être questionnée ! ●

Cécile Ropiteau