Loi “séparatisme”: loi d’amalgame et de stigmatisation.

C’est dans un contexte de plus en plus sécuritaire et réactionnaire que le débat sur le projet de loi « confortant le respect des principes de la République » s’est ouvert hier à l’Assemblée nationale.
Dans l’exposé des motifs, ce PJL est présenté comme une réponse « à un entrisme communautariste … pour l’essentiel d’inspiration islamiste». La cible est donc clairement désignée : les citoyen-nes de confession musulmane et il ne s’attaquera pas à toutes les formes de séparatismes comme le laissait entendre son intitulé initial. Ce PJL remet-il par exemple en cause les statuts particuliers ou concordataires d’Alsace-Moselle, de Guyane ou de Mayotte ? Il semble bien que non !
De nombreuses analyses (SAF, LDH, DDD…) convergent pour en dénoncer le caractère disproportionné et répressif (1/3 des articles renforcent des dispositifs de contrôle, 1/4 définissent des peines d’emprisonnement) et l’absence de toute disposition en faveur de la mixité sociale ou de la lutte contre les discriminations qui sont les terreaux sur lesquels prospèrent les idéologies radicales. Le PJL touche pratiquement tous les droits et libertés publiques et remet en cause de grandes lois relatives à celles-ci (1881 sur la liberté de la presse, 1905 sur la séparation des églises et de l’État, 1901 sur la liberté d’association …).
Il ne comporte aucune disposition que l’on pourrait analyser positivement. Les dérogations possibles aux autorisations désormais nécessaires à l’instruction en famille, montrent que l’institution n’entend pas s’attaquer réellement à un problème qu’elle contribue elle-même à créer en démantelant progressivement l’école publique. Il est fort probable aussi que le contrôle accru sur les écoles hors-contrat, ne s’exercera pas de manière indifférenciée, en particulier vis à vis de celles que le Ministre lui-même a vantée publiquement pour leur innovation (du Réseau Espérance Banlieue) Par ailleurs, ces dispositions devraient sans doute davantage relever d’une loi sur la protection de l’enfance ou sur l’école.
Quant aux dispositions prétendant défendre les droits des femmes comme celle prévoyant la pénalisation des médecins délivrant des certificats de virginité, des personnalités du monde médical et de nombreuses associations (comme l’Association nationale des centres d’IVG et de contraception, le collectif contre le viol, le Planning Familial) s’y opposent car elle ne résoudra en rien les problèmes de pression subis par certaines femmes.
Parce que cette loi est contre-productive au regard de l’objectif affiché. Parce qu’elle est une loi d’amalgame et de stigmatisation. Parce que c’est une loi fourre-tout « qui pose plus de problèmes qu’elle n’en résout » comme l’a déclaré Benoit lors d’une audition à l’Assemblée. Parce ce qu’elle ne sert qu’à nourrir les divisions dans la société sans s’atteler aux racines du problème, la FSU doit s’opposer clairement à celle-ci. C’est ce qu’elle a fait en signant la tribune « Ne jouons pas avec la République » appelant à retirer ce projet. La FSU doit maintenant informer, sensibiliser les collègues sur ce projet de loi comme sur tous ceux qui remettent en cause les droits et libertés afin de permettre le développement des mobilisations autour de ces questions. Dans un contexte de banalisation des idées et du discours de l’extrême-droite, la FSU doit réaffirmer avec forces les valeurs de liberté, d’égalité et de solidarité. Face à l’instrumentalisation de la laïcité à des fins politiciennes, il est indispensable que nous portions publiquement nos mandats sur la laïcité, comme cadre permettant la construction du vivre-ensemble.