L’épreuve du vote

Les élections dans la Fonction publique vont revêtir une grande importance, à la fois
parce qu’elles seront le juge de paix de la représentativité syndicale dans toutes les fonctions publiques
mais aussi, parce qu’elles peuvent avoir aussi de grandes conséquences en terme d’avenir du syndicalisme
dans les fonctions publiques et au-delà.

Dans un contexte d’offensives libérales menées par un gouvernement se disant de gauche, l’électorat populaire est plus que désorienté. Les élections politiques, les sondages et autres cotes de popularité sont là pour en témoigner et c’est malheureusement l’extrême droite qui engrange. Les valeurs de justice sociale, de solidarité, de sens du collectif sont en chute chez les salarié-es. La question qui est posée est de savoir quelle en sera la traduction dans cette élection concernant plus de six millions de salarié-es… D’autant que depuis le déchaînement décomplexé des remises en cause sociales, menées de concert par le gouverne­ment et le MEDEF, le mouvement syndical, dans son ensemble, a brillé par son incapacité à proposer aux salarié-es une autre voie. Et que le syndicalisme de la Fonction publique a du mal à s’adapter aux modifications en profondeur qui la frappe.

Premier enjeu donc, faire que nos collègues s’impliquent dans cette élection en y participant. L’affaire n’est pas forcément évidente au vu des conditions d’organisation du vote (informatique) qui se rajoutent aux faibles motivations… Voter pour des délégué-es syndicaux, se prononcer sur des plates-formes syndicales, c’est contribuer à retisser du lien entre collègues d’une profession, c’est reformer une démarche collective face aux employeurs (État, collectivités…), que ce soit sur des questions de poste, de gestion de carrière ou bien sur des réformes d’ampleur (comme il s’en profile encore dans la Fonction publique…). C’est la base même du syndicalisme, terrain sur lequel le Front national ne pèse pas (pour l’instant).

Second enjeu, faire que le syndicalisme de transformation sociale sorte renforcé face au syndicalisme d’accompagnement. Ce sera un enjeu de savoir quel syndicalisme les salarié-es vont promouvoir. Les choses ne sont pas évidentes au vu des scrutins importants qui, ces deux dernières années, ont vu le pôle CFDT/UNSA marquer des points. Un reflet sans doute d’une situation, où les salarié-es ne voyant pas de changement substantiel venir en terme d’alternative, une partie significative d’entre eux se « rabat » sur un minimum d’accompagnement, jugé plus « crédible »… Et malheureusement, la rentrée sociale, peu marquée par des initiatives de mobilisations, ne bouleverse pas la donne. Il reste le mois de novembre avec différentes initiatives « volontaristes » pour faire bouger les lignes.

Troisième enjeu, le vote pour la FSU, notre fédération. Elle était longtemps première dans la Fonction publique d’État, forte de sa prééminence dans l’Éducation nationale (où se retrouvent plus de 800 000 salarié-es). Mais cette force apparente s’est retournée du fait de la globalisation des scrutins dans toutes les fonctions publiques (pour la première fois, tout le monde va voter en même temps), et du fléchissement de participation dans le bastion historique. La confiance construite autour des syndicats de l’éducation ne s’est pas étendue jusque là dans les autres administrations. La présentation de listes FSU dans celles-ci va permettre justement de mesurer l’état exact de l’influence du U au delà des bases historiques, par delà les syndicats nationaux « poids lourds » de la fédération. La campagne de la FSU, menée à juste raison sur la défense des services publics et de leurs personnels, a cherché à unifier les différentes situations professionnelles autour d’un axe politique fort (« Avec la FSU, pour le service public ! »). Pas sûr malheureusement que tous les syndicats nationaux aient vraiment repris cette thématique commune.

La force d’attraction de la FSU a reposé historiquement sur un fort ancrage professionnel de ses syndicats majoritaires dans l’éducation, sur son image unitaire ainsi que sur une certaine combativité par rapport aux politiques menées. Depuis 2012 surtout, cette dernière est soumise à de fortes contradictions avec une difficulté à considérer le gouvernement en place et sa politique, non pas comme des « amis » mais comme des adversaires à combattre. Malgré cela, dans son positionnement général, la FSU reste clairement du côté du syndicalisme de lutte et de transformation sociale et c’est pour cela que nous voulons qu’elle sorte renforcée de ces élections. Une FSU forte de la confiance des personnels est une FSU en meilleure situation pour favoriser les convergences pour l’action et la transformation sociale. ●

Laurent Zappi