Antoine Chauvel : La campagne laïcité du Ministère ne parle pas de laïcité.

Quand on ne présente presque que des enfants issu·es de la diversité, quand on explique que s’ils et elles peuvent manger ensemble, nager ensemble, être ami·es, c’est cela la laïcité, on ment. On ment car la laïcité, « n’est pas une opinion parmi d’autres mais la liberté d’en avoir une. Elle n’est pas une conviction mais le principe qui les autorise toutes, sous réserve du respect de l’ordre public”, comme l’écrivait l’observatoire de la laïcité

Cela n’a donc rien à voir… En quoi pouvoir manger à côté d’un copain ou d’une copine, être amoureuse ou amoureux d’une ou d’un autre aurait à voir avec cela ? Absolument rien.
Par contre, et c’est son objectif car Blanquer est un idéologue, cette campagne diffuse un venin.
En jouant sur des stéréotypes, des préjugés, on propage l’idée que le danger principal envers la laïcité repose sur des communautés.
Cette campagne a donc, disons-le clairement, un fond raciste et islamophobe. Elle oppose la laïcité, sans jamais la définir, à des communautarismes fantasmés qui représenteraient forcément un danger potentiel.

Cette campagne participe d’une volonté de fracturer de la société en instrumentalisant encore une fois la laïcité à des fins politiciennes. Car du point de vue laïque, Blanquer est une énorme imposture.
Jean-Michel Blanquer, est par exemple un des fervents soutiens aux écoles hors-contrats « Espérances Banlieues ». De même, l’instauration de l’obligation scolaire à 3 ans a permis un soutien direct à l’enseignement privé, catholique à 97%, en ouvrant la possibilité d’un financement des établissements privés par l’argent public refusé jusqu’alors par une partie des communes pour les 3-6 ans.
Blanquer pratique ici comme les droites les plus extrêmes : il prend la laïcité comme prétexte pour servir une idéologie excluante qui elle est bien réelle et jamais sans conséquences.

La FSU a réagi immédiatement. Très justement. Il faut s’en féliciter collectivement.

Mais cette nouvelle offensive, en droite ligne de la suppression de l’observatoire de la laïcité comme de la posture d’interdiction, pour le moment remisée, de l’accompagnement des sorties scolaires par les femmes voilées, doit nous amener à envisager un changement de braquet dans notre appréhension du phénomène et notre expression laïque. À deux niveaux.

Le premier est développer notre communication à ce sujet notamment au moment où se met en place, à destination de tous les fonctionnaires, une formation descendante portant une vision univoque de la laïcité non comme principe réflexif mais comme dogme.
Mais aussi en se s’alliant avec celles et ceux dont c’est l’objet de travail principal. Ainsi un travail étroitdu SNUipp avec la Vigie de la laïcité, héritière de l’Observatoire de la laïcité, voire une adhésion si possible, mériterait d’être actée.

Le second est d’occuper le terrain en tenant compte de ce contexte. La laïcité n’est pas un principe abstrait ni déconnecté des réalités sociales qui nous entourent. Avec un fond de l’air de plus en plus brun, en soutien total à nos camarades fiché·es par les fachos, il faut que le SNUipp-FSU sache marcher sur les deux jambes de la défense de la laïcité et de la lutte contre toutes discriminations.