Alerte typhons, alerte climat

Le typhon Haiyan, qui a balayé les Philippines le 8 novembre dernier, n’aura fait les titres des media que quelques jours.

Des milliers de morts, des régions entièrement détruites, ce typhon a été d’une ampleur considérable.

Il s’agit du cyclone le plus puissant jamais enregistré touchant terre. Les vents ont atteint une vitesse soutenue de 310 km/h, avec des rafales allant jusqu’à 375 km/h.

Le super typhon a traversé en son centre, d’est en ouest, l’archipel des Philippines, balayant sur son passage une grande partie des îles formant les Visayas. Les destructions sont d’une rare ampleur : 80 à 95% de dizaines d’agglomérations soufflées ; de nombreux villages côtiers rayés de la carte.[[Pierre Rousset (Europe Solidaire Sans Frontières) Les Philippines, un mois après le passage du super typhon Haiyan.]]

Chaque année, vingt typhons en moyenne touchent les Philippines. Pourtant, c’est la première fois qu’un typhon de cette puissance survient.

Le réchauffement climatique est montré du doigt. Si le GIEC (groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat) n’a pas voulu attribuer avec certitude ce typhon au dérèglement climatique, il n’en explique pas moins que l’augmentation de la température globale des océans due au réchauffement climatique risque d’accroître ce genre de super-ouragans : « Bon nombre des changements observés sont sans précédents depuis des décennies voire des milliers d’années… on constate des événements récurrents et ce cyclone vient s’ajouter à la longue liste de ceux, très intenses, observés ces dernières années.

Notre crainte, c’est que le réchauffement climatique ne favorise des cyclones de plus en plus violents, provoquant des dégâts 
de plus en plus graves ».

**Tout le monde n’est pas égal devant le climat

Le réchauffement climatique n’est pas naturel et il est particulièrement injuste. Pas naturel, parce que c’est la course infinie au profit qui a engendré un modèle de développement économique destructeur pour le climat.

Un modèle qui a servi essentiellement les plus riches et qui touche particulièrement les populations les plus défavorisées des pays du Sud.

Dans les îles touchées, vivent des paysans pauvres, sans terre. Les forêts ont fait place à de vastes plantations au bénéfice de propriétaires terriens et de l’ancien colonisateur américain, ce qui a rendu les îles très vulnérables.
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Dans les villes côtières comme Tacloban, les plus pauvres ne trouvent souvent un toit que dans des bidonvilles situés dans les parties les plus proches du rivage, alors que les plus nantis sont sur les hauteurs.

Aujourd’hui, plus d’un quart de la population des Philippines vit avec moins d’un dollar par jour. Et près d’un quart de la population active a dû émigrer pour fuir la misère.

Les pays pauvres situés dans des régions cycloniques sont les plus démunis du point de vue climatique et social. Ils sont ceux qui ont le moins contribué au réchauffement climatique et ils en sont les premières victimes.

**Irresponsabilité

Pourtant, cette catastrophe, aussi effroyable que tragique, n’a pas amené les pays développés à prendre des engagements en matière de mesures concrètes de lutte contre le changement climatique.

Il y a même eu machine arrière lors de la COP19 à Varsovie [[COP19 : 19ème conférence de l’ONU sur le climat ,Varsovie les 11-22 novembre 2013, la COP 20 aura lieu au Pérou et la COP 21 à Paris.]]. L’Australie, le Canada et le Japon ont revu leurs objectifs à la baisse pour 2020, alors que l’Union européenne refuse de revoir les siens à la hausse.

Or, en calcul cumulé, ce sont 8 à 12 milliards de tonnes de CO2 qui sont émis en trop chaque année pour ne pas dépasser les 2°C de réchauffement d’ici la fin du siècle. L’Union européenne juge que la crise climatique ne doit pas conduire à mettre en cause la « compétitivité » des entreprises.

**Se mobiliser dès maintenant

Il est de plus en plus clair maintenant que chaque année passée a son importance pour enrayer une hausse globale de la température prévue de 2°C, ce qui constitue la limite au-delà de laquelle le changement climatique global sera très sérieusement détraqué.

Les mouvements, qui ont quitté les négociations à Varsovie [[Climat : les mouvements et ONG quittent les négociations – Explications ! Maxime Combes-Attac-France.]] annoncent vouloir construire une véritable mobilisation citoyenne : « Sans une telle pression, impossible de faire confiance à nos gouvernements pour qu’ils fassent ce dont le monde a besoin ». ●

Sophie Zafari