Adrien Martinez : engager des solidarités concrètes avec le peuple grec

Il n’aura échappé à personne que, dans l’ensemble des pays d’Europe, avec la bénédiction des instances européennes, des politiques d’austérité sont à l’oeuvre. Mais il faudra aussi dire que l’opposition à ces politiques est en train de prendre de l’importance . En Grèce, bien entendu. Mais pas uniquement. En Espagne avec Podemos ou en Irlande, la gauche anti-austérité est en tête dans les sondages. La Belgique et l’Italie ont connu des mobilisations importantes. Mais oui. En Grèce, surtout.

Et ce qui s’y passe doit nous intéresser syndicalement, et ce pour plusieurs raisons.

Tout d’abord, parce que nous faisons face à une triple opération de dévoilement. Dévoilement de jusqu’où les défenseurs des politiques austéritaires sont prêts à aller contre les peuples. Depuis cinq ans et avec la mise sous la tutelle de la Troika, les salaires en Grèce ont chuté de 38 %, les retraites de 45 %. Le Taux de chômage est passé de 9 à 27 %. Le taux de pauvreté a doublé, et concerne 32 % des grecs. Les taux de suicide et de dépression ont explosé. Et avec pour corollaire économique l’effondrement du PIB de près de près de 25 %, et l’augmentation du poids de la dette de 110 % à 175 % du PIB.

Dévoilement du déni de démocratie : le 25 janvier le peuple grec a porté au pouvoir Siriza, avec un programme en rupture avec les politiques imposées par la Troika. Aussitôt la BCE, la commission européenne, et l’ensemble des gouvernements européens, ont manifesté avec force leur volonté d’abattre toute alternative, en rappelant que « des engagements avaient été pris par le gouvernement précédent et qu’ils devaient être tenu ».

Dévoilement enfin que c’est au niveau européen que l’austérité se décide.
Ce triple-dévoilement nous indique le niveau d’affrontement auquel sont prêts les tenants des politiques d’austérité. Ce qu’il nous faut prendre en compte syndicalement pour reconquérir nos droits démocratiques, économiques et sociaux.

Les tenants des politiques austéritaires déploient les même arguments en Grèce, en France, ou dans l’ensemble de l’Europe : crise, poids de la dette, frein qu’imposent les avantages sociaux à la compétitivité.

Alors peut-être que, 10 ans après la campagne unitaire contre le TCE, il est temps de refaire œuvre d’éducation populaire sur ces questions. Utiliser ce que vit la Grèce pour démontrer concrètement en quoi l’alternative aux politiques d’austérité et non seulement possible, mais vitale. Démontrer qu’il n’y a pas d’opposition entre le peuple grec et le salariat du reste de l’Europe. Bien au contraire. Nous subissons partout la même politique qui vise à un transfert d’argent des populations vers la minorité la plus riche.
A l’exception d’un appel de soutien de syndicalistes allemands, les mouvements sociaux, et le syndicalisme en particulier, n’ont pas su encore répondre à ces enjeux, n’ont pas su instruire les solidarités concrètes avec le peuple grec et ouvrir les perspectives pour une mobilisation large et unitaire contre l’austérité en France et en Europe.

Pourtant, c’est certainement un enjeu fondamental. Il en va de l’amélioration de nos conditions de vie et de travail. Contre le recul idéologique que nous subissons et dont profite l’extrême-droite, faire vivre d’autres choix, les porter auprès de la population, démontrer qu’ils sont possibles et indispensables. Avec aujourd’hui le peuple grec. Pour imposer, en France et en Europe, en participant et en construisant les mobilisations européennes nécessaires, des politiques aux bénéfices des peuples.