Refonder l’éducation, oui : c’est prioritaire !

La mise en place dans les années 80 de la politique d’éducation prioritaire (EP) n’a pas fait l’unanimité : discrimination positive, mais discrimination quand même. Certains redoutaient la stigmatisation des établissements ciblés, d’autres y voyaient un coin dans le collège unique. Le principe de compensation (donner plus à ceux qui ont moins) a cependant permis de donner un élan à cette politique, et ce pour une raison fondamentale : là, comme partout ailleurs, mêmes programmes, mêmes exigences, même cadre national !

Trente ans plus tard, ce qui devait être provisoire n’en finit plus de durer : de fausses relances en dynamitage, la politique d’aujourd’hui n’a plus rien de prioritaire. Les ECLAIR en sont l’apothéose : la mise en place d’une école capitaliste qui trie, sélectionne et formate, à coup d’individualisation, les élèves comme les personnels.

Devant ce champ de ruines, le SNES réclame une relance de l’EP, il réfute la politique actuelle, qui cible des « publics prioritaires ». Faut-il baser la politique d’EP, comme au départ, sur des territoires socialement, économiquement défavorisés ? Quels territoires, comment les cibler alors que l’assouplissement de la carte scolaire permet un évitement encore plus aisé des zones labellisées, peu à peu ghettoïsées ?

Depuis la naissance des ZEP, nous martelons que ces zones sont des laboratoires d’expérimentation et de déréglementation : le glissement s’est opéré vers une sortie progressive, aujourd’hui effective, du cadre national. Allons-nous persister dans cette voie ?
L’école française est le reflet d’une société inégalitaire ; les inégalités sont diffuses au sein de l’école qui ne parvient pas à les dépasser. La question politique qui se pose dépasse le périmètre de l’école. Peut-on continuer à réclamer le même schéma d’EP alors que le contexte est radicalement différent ?

La voie à suivre ne serait-elle pas de militer pour une école commune, coopérative, enfin égalitaire ? D’y développer des dispositifs d’aide (co-interventions, personnels surnuméraires, petits groupes, approches pédagogiques diversifiées), d’y renforcer la formation initiale et continue des personnels, d’y permettre le travail partagé entre tous personnels, enseignants ou non, et des parents ? Si l’on convient que l’opposition binaire (ZEP-non ZEP) n’est plus pertinente, ne faut-il pas raisonner aujourd’hui en nécessité absolue (donner le maximum à tous !), en travaillant d’arrache-pied à reconstruire de la mixité sociale (une autre politique de la ville, une autre carte scolaire, repensée et au cadrage fort) qui débouchera sur une réelle mixité scolaire ?

Véronique.