Les défis du syndicalisme

L’extrême-droite semblant inéluctablement qualifiée pour le second tour de la présidentielle, la seule incertitude de cette élection apparait réduite à l’identité de son futur concurrent. Le banquier qui a été le grand inspirateur de la politique libérale du gouvernement et qui promet d’aller encore plus loin s’il est élu ? L’inculpé assoiffé d’argent, lié aux courants les plus réactionnaires de la droite, qui développe un programme au bulldozer pour s’attaquer à la protection sociale, aux services publics, au droit du travail, à la Fonction publique et aux retraites… ?

Quel que soit le cas de figure final, et même s’ils ne sont pas tous sur le même plan, les grands perdants seront malgré tout les salarié-es et l’immense majorité de la population.

La fragmentation de la gauche politique sur la question de la rupture avec les politiques libérales menées depuis des années décuple le rôle du syndicalisme dans cette période. Sa responsabilité est d’incarner, pour partie, à la fois la résistance au rouleau compresseur du capitalisme et la possibilité, la nécessité également, d’une autre société dans son rapport au travail, dans son partage des richesses, dans l’émancipation des femmes, de la jeunesse et des victimes du racisme…

Pour cela, il faudra s’engager massivement dans les mobilisations et leur donner une autre dimension comme l’a fait la journée du 8 mars cette année avec l’irruption de la grève, même symbolique, et sa portée internationale en écho aux luttes des femmes polonaises, islandaises, étatsuniennes… La journée de grève du 7 mars dans l’hospitalière et la territoriale montre que les attentes revendicatives sont là. La journée du 19 mars contre les violences policières, pour la justice et la dignité prend, elle, la forme d’une première jonction entre les organisations « traditionnelles » du mouvement ouvrier et du mouvement antiraciste avec de nouvelles formes d’organisation issues notamment des quartiers populaires.

Le 1er mai, à quelques jours du second tour de la présidentielle, revêtira, lui, un caractère exceptionnel avec une forte portée antifasciste doublée d’un rejet du libéralisme à l’aune, entre autres, du bilan de ce gouvernement.

Le syndicalisme de transformation sociale devra également relever le défi d’une unité plus forte de ses organisations actuelles pour accroître son audience et son influence. Un dépassement souple avec la construction d’un front syndical permanent pouvant ouvrir la perspective d’un dépassement structurel vers une nouvelle confédération du syndicalisme de lutte et de transformation sociale.

Mais seul, le syndicalisme, même unifié, ne pourra pas tout. L’élargissement à l’ensemble du mouvement social est indispensable. Le collectif « nos droits, leurs privilèges » constitué à l’occasion de la campagne électoral à l’initiative d’ATTAC est une initiative à investir et à faire perdurer bien au-delà de cette campagne.

Se rassembler, démultiplier les rencontres avec les salarié-es, tisser des liens avec l’ensemble du mouvement social, ouvrir des espaces d’échanges et d’actions… dans l’objectif de préparer une contre-offensive sociale massive. Le rôle dévolu au syndicalisme peut apparaître immense mais n’en est pas moins incontournable. ●

Arnaud Malaisé