Rien n’est joué !

En ce début d’année, l’exercice éditorial classique est le « bilan/perspectives ». De ce point de vue, il n’y a pas grand chose à changer à l’édito de janvier dernier pour la situation européenne (hélas!).

Sauf que l’entrée en récession économique est maintenant confirmée, dû notamment aux choix politiques des gouvernements qui se sont inclinés – que dis-je ? Couchés et sans la moindre consultation de leurs populations, ni même de leurs parlements – devant la dictature des marchés financiers, exercée à coup d’évaluations des dettes souveraines…
On assiste à l’application de la « stratégie du choc » : partout, des mesures d’austérité, des attaques sur les droits sociaux. En Grèce, on en est à la privatisation massive, à bas prix, des biens publics…

Le discours de Sarkozy à l’université de Strasbourg en novembre 2011 était clair : pour lui, cette crise est une chance de bâtir un monde nouveau !
Mais les politiques actuellement menées font sérieusement douter que ce monde soit vivable pour la plupart des espèces vivantes… La catastrophe de Fukushima est venue rappeler les dangers et le « coût » écologique, humain de l’utilisation du nucléaire avec une dette – non évaluée ! – qu’elle laisse à payer aux générations futures.

Pourtant, l’année 2011 a connu sur le plan politique mondial des évènements qui ont suscité bien des espoirs : des peuples se sont révoltés, notamment dans le monde arabe, contre les dictatures qui les opprimaient. Les révolutions de ces populations nous renvoie l’absence de réaction du mouvement social dans les pays dits développés, en dehors des actions des Indignés (qui peinent tout particulièrement en France à se développer). Faudra-t-il attendre que la misère en France et ailleurs en Europe ait rejoint celle de ces pays, à force de suivre les préconisations du FMI, pour qu’enfin les citoyens réagissent ? Est-il plus facile de se révolter contre des dictatures sanguinaires que contre celle, plus insidieuse, du capital financier mondialisé ?

Cela pose de grandes questions sur l’existence d’un lien entre le niveau de scolarisation de la population, le développement de l’esprit critique et la capacité à faire vivre la démocratie. Cela doit nous interpeller tous, en particulier les enseignants et éducateurs parmi nous, sur le modèle éducatif auquel nous contribuons et l’enjeu des réformes qui lui sont imposées actuellement.

Ainsi, le projet de modification de l’évaluation des enseignants paru fin novembre et la mise en place de l’évaluation quadriennale des enseignants-chercheurs introduite en 2009 sont de puissants outils de normalisation des comportements des agents, comme les évaluations des agences de notation le sont pour les gouvernements actuels qui soumettent ainsi leurs politiques à l’hystérie des marchés financiers.

Le mouvement syndical fait face à une tâche immense et son atonie est préoccupante. En France, malgré l’augmentation des problèmes sociaux, l’intersyndicale est paralysée en cette période pré-électorale, incapable de fédérer les actions existantes et de répondre aux attentes des travailleurs et chômeurs de plus en plus nombreux.

A un an de son congrès, à un moment où il faudrait pouvoir compter sur un renforcement du syndicalisme de transformation sociale, la FSU sort affaiblie des élections professionnelles. En cause principalement, les dysfonctionnements induits par des décisions de ses gros syndicats d’enseignants qui se trompent encore d’époque et d’ennemi !

Pour essayer de « positiver » en ce début d’année, notons que le débat sur le nucléaire qui a débuté en France dans le cadre de la campagne électorale est déjà signe d’une prise de conscience qui s’élargit, même si ce n’est pas encore celui que nous aurions souhaité. On espère aussi que 2012 verra la fin des tueries en Syrie, l’avènement de gouvernements et de sociétés démocratiques après les révolutions du monde arabe. Et les initiatives citoyennes qui foisonnent sont le signe que tout n’est pas joué.

Yapuka fédérer tout ça ! Bonne annéé !

Claire Bornais