Décentralisation, réforme de l’Etat : ruptures et continuités

Le gouvernement Sarkozy avait fait de la réduction de l’Etat, de ses moyens, de ses missions une priorité. Sa réforme des collectivités territoriales (CT) en était une conséquence (conseiller territorial unique, réduction des moyens des CT, spécialisation des compétences…). Le gouvernement Ayrault affiche une priorité à la décentralisation, dans tous les domaines et en tire des conséquences au niveau de la réforme de l’Etat : aller au bout des lois Defferre en terme de compétences, remodelage territorial et conséquences sur l’organisation de l’état et de la fonction publique. L’intitulé du ministère de Marylise Lebranchu explicite cette chaîne.
D’après ce qu’on peut débusquer des propositions gouvernementales (puisqu’elles sont surtout discutées avec les associations d’élus et n’ont toujours pas été soumises explicitement aux organisations syndicales), le « conseiller territorial unique » est abrogé, la clause de compétence générale réaffirmée mais le reste de la loi Sarkozy demeure sur les évolutions territoriales : intercommunalités, métropoles, fusion de CT. Alors que le gouvernement Sarkozy visait à réduire les finances des CT et le rôle des régions, les projets en cours visent au contraire à conforter leur rôle et à amplifier le rôle des régions (par exemple en leur transférant la gestion de crédits européens). Le lobby de l’Association des régions de France (ARF) ne cesse de s’exercer pour obtenir le pilotage de la chaîne orientation-formation-emploi.

Education et décentralisation
sont dans un même bateau

La loi Education de V. Peillon va précéder de quelques mois la publication de celle sur la décentralisation. Pourtant, des questions importantes comme l’organisation du service public d’orientation, du pilotage et de la formation professionnelle en seront aussi fortement impactées. Une logique « décentralisatrice » court en sourdine au travers de la modification de plusieurs articles du code de l’éducation en renforçant le rôle des CT, y compris au niveau administratif. Le projet de loi Education acte par anticipation la référence aux métropoles ou la possibilité pour le président du conseil régional, après « avis » du CA, d’autoriser l’utilisation de locaux du lycée pendant les heures de cours par des entreprises ou des organismes de formation.

Quelques autres exemples :
– le parcours d’éducation artistique et culturelle peut s’inscrire dans le cadre d’un « partenariat avec les CT » .
– les administrations concernées, les collectivités territoriales, les entreprises et les associations « contribuent » à la mise en œuvre du parcours individuel d’information, d’orientation et de découverte du monde.
– le CA se prononce sur le contrat d’objectifs conclu entre l’établissement, l’autorité académique « et le cas échéant la collectivité de rattachement » .
– les activités périscolaires peuvent être organisées dans le cadre d’un projet éducatif territorial « associant » aux services et établissements de l’Education Nationale d’autres administrations, des CT, des associations…
– le projet de décret « rythmes scolaires » présente les mêmes caractéristiques. Casus belli de taille : un maire pourra saisir directement le DASEN pour modifier l’organisation des rythmes scolaires… sans passer par le Conseil d’école !