La France vient de perdre ses trois A ! Elle n’est pas la seule. Standard & Poor’s [1], a aussi dégradé la note, et plus durement, du Portugal, de l’Espagne et de 5 autres pays de la zone euro.
Les deux autres grandes agences, Fichte et Moody’s ont aussi mis tous ces pays « sous surveillance » reprenant à leur compte la même analyse.
Une question de politique politicienne.
S&P’s a réussi une grande première. Faire perdre à Sarkozy sa langue. Il laisse parler son Premier ministre qui n’en demandait pas tant. Pour répéter encore et encore qu’il faut plus d’austérité tout en réfutant l’annonce d’un troisième plan de rigueur.
Le gouvernement allemand défend son allié pour continuer de construire ce drôle de personnage appelé « Merkozy ». L’agence de notation ne pouvait diminuer la note de l’Allemagne, elle a donc fait payer aux autres pays de la zone euro, la crise financière et économique qui se poursuit et touche, à l’exception de l’Allemagne pour le moment, tous les pays de la zone.
Pour la France, la question est plutôt de politique interne que d’économie. Nicolas Sarkozy avait fait du maintien des trois A, le nec plus ultra de sa politique. Il fallait à toute force conserver cette notation. Alain Minc allait jusqu’à dire que c’était notre « trésor national »... Avant de se rétracter face à la réalité !
La baisse des dépenses publiques, l’augmentation de la TVA… Toutes ces mesures impopulaires ne se trouvaient justifiées qu’en fonction de cette nécessité. Disparaissait le pourquoi.
Désormais, le vocabulaire s’est de nouveau enrichi. La première crise financière avait fait des subprimes un sujet de discussion, la deuxième permet de voir surgir un nouvel acteur : les agences de notation et leur fameux 3 A [2]. Le « sommet de crise » a dû trouver un nouvel angle d’attaque pour justifier ces politiques : la compétitivité des entreprises françaises.
Elle s’était fait oublier, on la retrouve. Elle permet d’avancer une des mesures phares du gouvernement – que le président de la République n’a pas annoncée lors du sommet du 18 janvier 2012 – la hausse de la TVA pour alléger les charges sociales des entreprises.
Autrement dit, Sarkozy veut faire payer doublement les salariés : d’abord en baissant le salaire indirect, redistribué, qui finance toute la protection sociale, et en augmentant les prix via un impôt indirect qui fait payer davantage les bas revenus que les hauts. L’injustice sociale au carré sinon au cube !
Par le biais de la baisse des recettes de la protection sociale, de la Sécurité sociale, se profile une baisse drastique des dépenses – sous prétexte de lutter contre un déficit qui serait « abyssal » -, et c’est tout le modèle social français qui éclate.
En conséquence, la baisse du marché final sera encore plus importante. Le risque d’une dépression est au bout de cette politique.
Pourtant, les effets à court terme de cette baisse de la notation ne sont pas aussi catastrophiques que prévus. Le 19 janvier, l’Agence France Trésor (AFT) [3] a placé sur les marchés toutes les obligations (dites OAT, obligations au Trésor) émises à un taux de 3,138% à 10 ans et à un taux inférieur pour des obligations indexées sur l’inflation.
Certes, ce taux à 10 ans est le double de celui de l’Allemagne mais moins élevé que celui pratiqué en janvier 2011 qui était de 3,33%. L’Espagne, ce même jour, a réussi aussi à placer ses obligations à un taux de 5,152% toujours sur 10 ans, alors que ce taux se montait à 5,435% en janvier 2011. Le Portugal, qui a été plus fortement dégradé et est considéré comme « insolvable », a placé des Bons du Trésor à 11 mois à un taux de près de 5% alors que ses taux à 2 ans se montent à… 15% !
Il existe donc un écart entre le coût effectif de financement, soit le taux de l’émission, et le taux du marché secondaire, lieu où s’échangent les obligations répondant aux dettes « anciennes » des Etats.
Une anomalie relevée par les opérateurs qui s’explique par « la répression financière ». Les Etats – en France donc l’AFT – « forcent » les banques et les investisseurs institutionnels à souscrire de la dette souveraine au meilleur prix. On pourrait élargir la question en exigeant des banques qu’elles souscrivent les obligations à un taux de… 0%. C’est dire que les moyens politiques existent [4].