Repenser la formation des enseignant-es pour transformer l’école

Formation des enseignant-es :
quels contenus et quelles modalités pour la démocratisation scolaire ?
François Hollande avait fait de l’école et de la jeunesse sa priorité.

Dès le début du quinquennat, Vincent Peillon s’est attaqué à « refonder l’école », à travers notamment la formation des enseignant-es.

Les premières mesures prises – création précipitée des Espé, modification brutale de la place et des épreuves du concours – ont pour l’instant créé davantage de difficultés concrètes pour les étudiant-es et les formateur-trices qu’elles n’en ont résolu.

Pourtant, on ne peut que partager l’idée affichée : pour refonder l’école, il faut changer la formation de celles et ceux qui y enseignent.

En effet, la deuxième explosion scolaire des années 1980-1990 a certes prolongé la scolarité des enfants de classes populaires mais n’a pas réduit significativement les inégalités.

Elle n’a pas non plus réglé celui des inégalités entre filles et garçons. L’enjeu de la refonte de la formation des enseignant-es est donc de taille : il s’agit de réfléchir et de mettre en place une formation qui outille les futur-es enseignant-es, mais aussi ceux qui sont déjà en poste, pour qu’ils soient à même de contribuer à la disparition de ces inégalités.

Il s’agit tout à la fois de penser la place du concours, son contenu, la nature des savoirs à acquérir en formation, le lieu de formation (terrain et/ou école spécialisée), le type de formateur-trices. Un autre enjeu décisif est qu’un nombre suffisant de jeunes veuille préparer les concours et exercer le métier : le recrutement d’enseignant-es est indispensable lui aussi à l’amélioration du système éducatif.

Le dossier présenté ici interroge donc à la fois ce qu’est la formation des enseignant-es aujourd’hui en France, comment elle s’est construite, mais aussi ce qu’elle pourrait être.

**Le problème de la place
des concours

La dernière réforme qui place les concours dans la deuxième moitié de l’année de M1 est quasi unanimement décriée.

Cela oblige les étudiant-es à préparer en un temps très réduit (quelques mois) des épreuves très sélectives, tout en validant leur année de master. Il y a fort à craindre que pendant l’année de M2 les nouveaux stagiaires (en poste à mi-temps) seront utilisés comme moyens d’enseignements : c’est déjà le cas des M2 contractuels et admissibles cette année.

Pour autant la situation précédente, créée par la réforme de la « mastérisation » en 2009, n’était pas satisfaisante : une partie importante des stagiaires n’avaient reçu aucune formation (notamment ceux qui avaient un master purement disciplinaire), et on constatait déjà l’impossible conciliation des objectifs de formation au métier, de préparation du concours et de validation du master.

Si l’accord est assez large, notamment dans la FSU, pour relever le niveau de qualification des enseignant-es, cela ne règle pas la question de la place du concours : à la fin de la licence, suivie d’une formation rémunérée au niveau master ? Après le M2 ?

Nous avons fait le choix de ne pas focaliser ce dossier sur la place du concours. Essentielle dans l’articulation de la formation et pour les conditions d’études et d’entrée dans le métier, il est néanmoins illusoire de penser qu’il suffirait de lui trouver une « bonne » place pour régler les problèmes de la formation.

La plupart de ses syndicats nationaux se prononçant pour un niveau de recrutement élevé, la FSU réclame des prérecrutements pour les étudiant-es se destinant aux métiers de l’enseignement.

Les emplois avenir professeur (EAP) ne répondent pas à cette demande. Les étudiant-es doivent des heures de présence dans les écoles ou établissement, sans que leurs tâches ne soient pensées dans une optique de formation. Et s’ils renoncent au concours, ils pourraient même devoir rembourser leur rémunération !

Les prérecrutements ne doivent pas s’accompagner de contreparties de travail sur le terrain.

**Réfléchir aux contenus
de formation et à leur
articulation

La refonte de la formation des enseignants exige du temps. Du temps pour tirer un bilan objectif et lucide de l’apport des IUFM , et, sans idéaliser cette expérience, ne pas tirer un trait définitif et idéologique sur plus de 20 ans d’histoire de la formation.

Le temps nécessaire, c’est aussi celui de la
formation elle-même : apprendre et expérimenter les savoirs nécessaires aux professionnels de l’enseignement et de l’éducation exige un travail long et continu, qui se prolonge au-delà des premières années d’exercice dans une formation continue de qualité.●

Mary David